Comment naît une statue du Chat?

Lorsqu’on ne disposait pas de camions, de grues et de la technologie moderne, les statues de bronze étaient fabriquées sur le lieu où elles allaient être exposées. On construisait un four sur place pour accueillir la création qui était fondue en une pièce. Ce temps a bien changé et la création d’une statue monumentale du Chat nécessite une série d’étapes faisant appel à des outils modernes mais surtout un savoir-faire intemporel. Nous vous dévoilons ici, en compagnie de Philippe Geluck, la naissance d’une statue du Chat de 2,70 m de haut.

Dessin, fil de fer et terre glaise

La première étape de la création d’une statue du Chat est un dessin. Au départ, Philippe Geluck a été cherché son inspiration dans des illustrations existantes. Au fil de ses recherches, il a laissé partir son imagination dans un univers en 3D, pensant ses dessins en fonction de l’intérêt que donnerait telle ou telle pose coulée dans le bronze.

Un dessin du Chat préfigurant la statue L’autre Discobole © Geluck / Casterman

Une fois la statue esquissée sur papier dans toutes les vues, l’artiste s’attelle à une première ébauche en fils de fer pour vérifier la stabilité de la posture pressentie. C’est surtout vrai pour les statues où le Chat n’a pas les deux pieds ancrés au sol ainsi que lorsqu’un objet ou un personnage secondaire vient perturber l’équilibre de la composition.

Une fois les lignes de force et l’équilibre évalués, la troisième étape donne forme à une mini-statue brute en pâte Darwi.

Dessins sur papier et ébauches en fils de fer © Geluck

Pour se lancer dans la production du modèle original d’environ 50 cm de haut, l’auteur établit une série de croquis pour compléter son ébauche en fils de fer et faire fabriquer un squelette en barres d’acier. C’est sur cette base, qu’il se lance dans le façonnage de sa statue avec de la terre glaise.

Silicone, polyester et polystyrène

Lorsque le modèle en terre glaise est prêt, on lui applique une couche de silicone d’un centimètre d’épaisseur pour produire un moule souple. Celui-ci est ensuite recouvert de polyester rigide et divisé en plusieurs parties. Ce moule sert à créer un modèle en polystyrène qui servira de modèle de référence. La version en terre n’a qu’une vie réduite car la terre devient friable en séchant.

Préparation du modèle de référence en polystyrène © Geluck

Petit Chat deviendra grand

Le prototype en polystyrène de 50 cm de haut environ est envoyé dans un atelier spécialisé pour être scanné en 3D. Il en résulte un fichier en haute définition qui permet de créer les statues dans les autres formats.

Sur base des données recueillies par le scan, un robot réalise par fraisage le modèle monumental en polystyrène. Ensuite on corrige à la main les défauts laissés par la machine et on donne à la statue sa texture en lui appliquant une couche de plâtre sur laquelle on donne des coups de « peigne ».

Comme pour le modèle de référence, le fondeur et son équipe réalise alors un moule en silicone, mais vu la grande taille du sujet, il est nécessaire de découper la statue en 7 à 8 morceaux, ce qui donne autant de moules.

La statue au format réel en cire « perdue »
© Marc Carlot / Agenda BD

Chaque moule en silicone est tapissé d’une couche de cire de 5 mm. Les pièces en cire sont ensuite assemblées pour donner une réplique exacte de la statue finale en cire bleue, rouge ou jaune. A cette étape, il est encore possible de faire quelques retouches si nécessaire. Lorsque le résultat est jugé bon, on redécoupe la statue de cire en plusieurs morceaux. Ceux-ci sont alors enfouis dans du plâtre réfractaire dans des « sarcophages ». Pour durcir le plâtre, les sarcophages sont placés dans un four à 600°C pendant 14 jours. Durant cette opération, la cire « perdue » fond et laisse un vide dans le plâtre qui accueillera le bronze liquide lors de la phase suivante : le coulage du bronze.

Le coulage du bronze est une étape délicate car il est indispensable de couler la quantité requise dans chaque sarcophage en une seule fois. S’il venait à manquer de métal liquide, tout serait à recommencer. Jo van Geert, le fondeur, y est très attentif et son œil expert jauge parfaitement la quantité de bronze nécessaire pour chaque moule de plâtre. Le creuset recueille le bronze fondu à 1050°C.

Le coulage du bronze dans les sarcophages de plâtre réfractaire
© Marc Carlot / Agenda BD

Une fois le sarcophage refroidi, le plâtre est cassé pour libérer la pièce de métal.

Les différentes parties de la statues sont alors soudées ensemble et ciselées pour rendre la soudure totalement indiscernable. Le bronze est ensuite poli pour lui donner un aspect brillant.

Les différentes parties de la statue sont soudées et ciselées
© Marc Carlot / Agenda BD
Philippe Geluck et son Chat ballerine © Marc Carlot / Agenda BD

La patine est le résultat d’une oxydation naturelle du bronze. Elle apparaît après une cinquantaine d’années lorsqu’on laisse les statues de bronze s’oxyder à l’air libre. Cela peut prendre un peu moins de temps si elles sont dans un environnement proche de la mer, car le sel augmente l’oxydation. Philippe Geluck a voulu donner une patine à ses statues sans attendre des dizaines d’années. Cette opération se réalise en oxydant le bronze avec du nitrate de cuivre. On peut obtenir des teintes différentes allant du noir au vert clair. La couleur retenue pour les statues du Chat est le vert clair « réséda », le même que celle de la statue de la Liberté et du toit du Grand Palais.

Maintenant que la statue est terminée, il reste à la figer sur son socle en acier de 1,5 tonne. La statue et son socle font environ 2,70 m de haut pour un poids total de 2,5 tonnes. Le socle donne un peu de hauteur à la statue, mais il fait partie intégrante de l’œuvre. Il est pourvu d’encoches pour pouvoir déplacer l’ensemble plus facilement.

Il ne reste plus qu’à emporter la statue et à l’exposer !

Jusqu’au 31 janvier 2022, les 20 statues monumentales du Chat de Geluck sont exposées à Caen dans 3 endroits de la ville : le port de plaisance, quai Vendeuvre, la place de la République et devant l’hôtel de ville.

L’exposition prendra ensuite la direction de Genève et de Luxembourg, avant d’autres étapes un peu partout dans le monde.

Toutes les infos sur Le Chat de Geluck : lechat.com

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